L'entrée en matière, mon propos, tout cela a l'air d'une blague, d'une plaisanterie de potache, mais ne vous y trompez pas : je suis sérieux, même si je ne dédaigne pas utiliser l'humour pour faire passer mes idées.
Le martinisme sans le surnaturel, est-ce possible ? Telle est la question. On dirait Hamlet en train de s'exprimer, tenant le crâne dans la pièce de William Shakespeare. En fait, la vraie phrase c'est "être ou ne pas être, telle est la question." Et tout part effectivement de l'être : quel est le sens de la vie ?
À une époque, j'ai cru trouver ce sens dans la démarche martiniste. Mais, manque de chance, la représentation que je m'étais faite de Dieu, du divin, a fini par se dissoudre, s'effondrer...
Je me retrouve président de groupe martiniste. Tout semble vouloir prendre une ampleur considérable, et quelques mois plus tard, patatras, toute ma vie vole en éclats. Le bateau du martinisme va sombrer, et il ne restera que quelques épaves auxquelles m'accrocher.
Au fil du temps, j'avais réussi à reconstruire, plus ou moins, des éléments de l'édifice. J'avais fini par retrouver des compagnes et compagnons de chemin afin de poursuivre la quête. Mais voilà que dans le groupe que j'avais rejoint, à un moment donné, faute de chef tenant le maillet, on a voulu que je devienne non plus président de groupe, mais Maître Initié et Initiateur.
Soyons franc, j'ai tenu quelques fois le maillet. Gérer le Rituel, j'y parviens mais gérer les humains .. . Je m'y sens pleinement incompétent. Comme Louis-Claude de Saint-Martin plaidant, je ne vais pas remplir mon chapeau de larmes mais ce ne sera guère plus glorieux. Mon Moi autistique va se mettre en alerte rouge puis fermer les canaux de communication, le stress aura pris le dessus, ma batterie sociale se sera rapidement épuisée et ce sera la perte du vaisseau qui sombrera avec moi.
Fait aggravant, dans mon cheminement maçonnique, je me suis rapproché de plus en plus des courants rationalistes scientifiques ; vous devinez sans doute l'Obédience. Et mon raisonnement s'y est trouvé de mieux en mieux. Ma relation au monde a progressé, ma relation aux hommes n'a pas bougé, mais ma relation à Dieu, j'ai fini par lui dire adieu. Non pas que l'on m'a, sous l'équerre et le compas, convaincu, forcé, contraint à l'athéisme ou à l'agnosticisme, mais qu'au fil du temps, pour mon raisonnement, cela s'est imposé comme une évidence, que dis-je, un truisme !
Et donc, cette transcendance avec qui j'étais en communication s'est évaporée. Mon phare métaphysique et surnaturel, ce colosse de Rhodes, était fait de pieds d'argile et avait fini par s'effondrer.
Maintenant, soyons honnête, regardons-nous dans le miroir, cela m'offrait également l'avantage de m'éloigner de ce satané maillet où j'ai vu tant d'autres réussir, certes, mais aussi certains aller au supplice et/ou y perdre leurs qualités.
Vous vous rendez compte rapidement que, dans ces circonstances, il est quasiment devenu impossible d'être encore martiniste, au moins d'y croire, et comme je ne peux pas feindre la foi et jouer la comédie, car je trouve ça honteusement hypocrite, j'ai donc décidé de prendre du recul.
Et je suis rentré, au niveau spirituel, dans une période que je pourrais qualifier d'œuvre au noir.
Ce courant martiniste, qui m'avait fait tant de bien en même temps qu'il m'avait administré de grandes claques dans la vie — car les hommes sont ceux qu'ils sont et ne sont pas subitement transmutés par l'initiation —, je disais donc, ce courant qui m'a donné tant de bien, eh bien, je ne voyais plus quoi en faire, et pourtant j'avais encore envie de pratiquer son rituel. Mais c'était impossible, vu que je ne croyais plus.
Que faire ?
C'est ce que je vais tenter de développer dans ce qui suit.
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